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Digital Workplace : comment organiser le travail en mode hybride

Hybride. L’adjectif n’a jamais été autant employé que ces derniers mois. Non pour qualifier le cloud hybride mais pour designer une nouvelle forme d’organisation du travail qui prend le meilleur du présentiel et du distanciel.

Un des acquis de la crise sanitaire aura été, en effet, la généralisation du télétravail qui favorise l’équilibre vie personnelle – vie professionnelle.

Près de deux ans après le début de la crise sanitaire, le travail à distance est devenu un acquis social qu’il s’exerce au domicile des collaborateurs ou depuis un tiers lieu. Toutefois, le « full remote » aura montré ses limites sur la durée. Plus que les contraintes logistiques ou familiales – logement exigu, enfants en bas âge -, c’est le manque d’interactions sociales qui pèse le plus chez les néo-télétravailleurs.

A la lecture des accords de télétravail signés ces derniers mois, un consensus se dessine autour de deux jours télétravaillés par semaine en moyenne. Pour autant, pas question de revenir au bureau pour effectuer le même travail qu’à son domicile, seul devant son écran. Autant, sinon, rester chez soi et s’affranchir des temps de transport.

Rémi Calvayrac, head of workplace & design chez JLL France

Le travail en mode hybride repose donc sur une répartition intelligente des tâches. « A la maison, le travail au calme sur les dossiers nécessitant une réflexion individuelle et de la concentration, avance Rémi Calvayrac, head of workplace & design chez JLL France. Au bureau, les activités collectives faisant appel à la créativité et à la coopération. »

Le bureau, un « hub social »

« Avec le passage au travail au mode hybride, le bureau affirme sa fonction de hub social, confirme Loïc Hervé, directeur général délégué de Perial Asset Management.

Le domicile n’a jamais été un lieu de travail et rien ne remplace le bureau comme lieu de socialisation. Le lieu fait le lien. »

Cette nouvelle organisation hybride suppose de revoir complétement l’aménagement de l’espace de travail. Bien sûr, les entreprises profitent de la généralisation du télétravail pour réduire leur surface immobilière de 20 % en moyenne. « Avant, la crise, il y avait en moyenne 8 poste de travail pour 10 personnes. Aujourd’hui, le ratio est de 6 pour 10 », observe Rémi Calvayrac.

Une grande partie des mètres carrés supprimés est toutefois réinvestie dans la création d’espaces collaboratifs. Pour entrer dans le mode hybride, le siège social doit, en effet, renforcer sa dimension collaborative en proposant une grande variété de formats avec des espaces de convivialité pour les échanges informels et des salles dédiés au brainstorming ou à la négociation ainsi que des « alcôves » individuelles pour s’isoler.

Un Flex Office…vraiment flexible

Foliateam a ainsi développé trois types de salles de réunion. « Nous avons de grandes salles de 20 à 30 personnes pour les comités de direction, les webinaires, la réception des clients et des salles intermédiaires de 4-8 personnes pour connecter les équipes sur site et celles en télétravail, explique Franck Marconnet, directeur Général délégué business & partenaires de Foliateam.
Enfin, il y a des box avec un écran connecté accueillant de 2 à 4 personnes. »

« Jusqu’alors, 70 % de la surface de bureau était consacré aux postes de travail individuels et 30 % aux espaces collaboratifs et à la détente, calcule Rémi Calvayrac. Nous en sommes à une répartition à 50 /50 et, demain, les ratios s’inverseront. »

Avec l’émergence de ces pratiques collaboratives, la mise en place du travail en mode hybride comprend des dimensions managériale et technologique. Il ne s’agit plus d’un projet immobilier mais d’un projet d’entreprise réunissant un trinôme inédit. A côté du directeur de la transformation, du responsable des services généraux ou du Directeur de l’environnement de travail (DET), on retrouve ainsi le DRH et le DSI.

Un Flex Office adapté aux besoins collaboratifs

L’aménagement de l’espace de travail est, bien sûr, fonction des spécificités d’une entreprise et de sa population. Pour Rémi Calvayrac, « il faut définir des personas d’utilisateurs en fonction de leur profil de consommation des locaux et imaginer derrière des parcours types. Si je télétravaille 1, 2, 3, 4 ou 5 jours par semaine, je n’aurais pas les mêmes besoins d’espace et d’outillage au bureau. »

Selon lui, 6 à 8 grands profils peuvent ainsi se dégager entre les collaborateurs nomades et sédentaires, les managers, les jeunes recrues, les clients, les fournisseurs. « Ils ne passent pas par les mêmes lieux, ne vient pas la même expérience. »

Dans ce contexte hybride, le flex office s’impose naturellement mais à des degrés variables selon les organisations. Des employeurs sont dans une logique du tout réservable, du poste de travail au box pour la « visio » jusqu’aux services annexes comme la cantine ou la conciergerie.

Certaines vont mêmes jusqu’à mettre en place un système de check-in / check-out par QR code ou capteur connecté et décident au bout de combien de temps un poste laissé vacant redevient réservable. A l’inverse, des entreprises s’assurent qu’elles ont bien dimensionner leurs bureaux pour éviter de passer par la case réservation.

A mi-chemin, d’autres sociétés ne placent que 30 % des postes en réservation et sacralisent des zones sur un plateau pour que les équipes retrouvent leurs rituels collectifs. « Les salariés ont déjà perdu la photo de famille, le mug et la plante verte de leur bureau, il ne faut pas leur enlever tous leurs repères », juge Rémi Calvayrac.

Vianney Goater, PDG de Deskare

« Pour encourager le retour au bureau, il faut réduire les incertitudes et assurer au collaborateur qu’il aura une place et retrouvera ses collègues », complète Vianney Goater, PDG de Deskare, une startup qui édite une solution de gestion du télétravail et du flex office. Dans le choix d’un outil de réservation, la DSI est toujours dans la boucle pour assurer son intégration avec le SIRH et la messagerie d’entreprise. »

Le flex office suppose aussi un travail préalable de dématérialisation et de gestion électronique de documents (GED), rappelle Loïc Hervé. « Il n’y a plus de documents sur les bureaux, d’armoire d’archives associée à un poste de travail. »

Pas de bug qui retarde les réunions

Mais le rôle de la DSI ne s’arrête pas là. Elle est aussi attendue pour équiper les salles de réunion en visioconférence. « Avant, seules de 10 à 15 % des salles étaient dotées de solutions de « visio », se souvient Fabrice Berthelot, directeur France de Poly. Complexes et coûteuses, de l’ordre de 15 K€, elles s’adressaient à une population VIP. Aujourd’hui, l’objectif à terme est de toutes les équiper. » Les ventes de barres de collaboration, vendues à moins de mille euros, exploseraient.

Loïc Hervé – Directeur général délégué de Perial Asset Management

Dans ce contexte, la connectivité des bâtiments devient un présupposé. « De plus en plus de groupes internationaux investissent des immeubles tertiaires répondant au label international WiredScore, observe Loïc Hervé. C’est un enjeu de productivité. Si chaque réunion commence en retard de 10 minutes pour des difficultés d’accès ou des problèmes de configuration, que de temps perdu. »

La DSI sera garante de la bonne interopérabilité des technologies en standardisant les solutions collaboratives et les équipements (casques, barres vidéo…). Elle doit s’assurer que les outils se connectent en temps et en heure sans écho, larsen ou problème de micro au risque sinon de se retrouver submergée par les demandes de support.

« Avant dans les salles dédiées à la visioconférence, une personne des services généraux ou du support venait avant chaque réunion pour s’assurer que tout fonctionnait », se souvient Fabrice Berthelot. « Aujourd’hui, le collaborateur entend retrouver au bureau la même simplicité d’usage qu’il connaît à la maison, poursuit-il. Que ce soit sur son poste individuel ou dans la salle de réunion, l’utilisateur passe par la même interface intuitive, les mêmes boutons. »

Tout doit être bien huilé, renchérit Rémi Calvayrac. « Un collaborateur n’a pas fait l’effort de venir au bureau et de supporter les temps de transport pour attendre qu’une salle se libère ou la résolution d’un problème technique. »

En matière d’accompagnement au changement, la DSI peut aussi rappeler les bonnes pratiques en matière de collaboration en mode hybride. « L’animateur de réunion doit s’assurer de l’engagement des participants sans privilégier les personnes présentes physiquement dans la salle, ce qui serait un réflexe naturel », rappelle Aurélie Utratny, customer success manager chez Foliateam.

Des « visios » plus inclusives grâce à l’IA

Le mode hybride suppose aussi d’assurer une équité de traitement entre les collaborateurs qui interviennent à distance et ceux qui sont présent physiquement en réunion. Paradoxalement, ces derniers sont désavantagés. Les participants présents dans la salle apparaissent dans le même flux vidéo, parfois réduits à des têtes d’épingle pour peu qu’ils soient nombreux à l’image. Par ailleurs, un micro pieuvre unique rend les interlocuteurs les plus éloignés inaudibles.

Fabrice Berthelot – Directeur Poly France

Pour des réunions plus inclusives, Fabrice Berthelot conseille de faire appel à un système de tracking vidéo basé sur la reconnaissance faciale. « La caméra intelligente suit l’intervenant qui parle, le cadre comme le ferait un cameraman pour mieux saisir ses expressions. »

Avec la fonction « people focus » de Cisco Webex ou « smart gallery » de Zoom, les éditeurs de solutions visioconférence proposent, toujours grâce à l’intelligence artificielle, de détourer les participants de la salle de la réunion puis de les replacer dans des vignettes individuelles comme s’ils étaient derrière leur PC.

La vue immersive, de type « immersive view » de Zoom ou « together mode » de Microsoft Teams, regroupe, elle, tous les collaborateurs dans le même plan virtuel, à la manière d’une salle de classe ou d’un amphithéâtre. En attendant, le métavers… Avec Mesh pour Microsoft Teams, annoncé pour le premier semestre 2022, les participants rejoindront une réunion virtuelle sous forme d’avatars personnalisés ou d’hologrammes.

Toujours dans le domaine de l’IA, un bâtiment intelligent est nativement préparé pour le travail en mode hybride selon Rémi Calvayrac. En générant un flot continu de données, il mesure en temps réel les taux d’occupation des salles, puis sur la base d’un historique, prédit leur fréquentation. « Le smart building permet de mieux comprendre les flux de circulation dans le bâtiment et de l’aménager en conséquence ».

« Dans un monde presque parfait, le bâtiment s’autorégulerait en ajustant la température salle par salle en fonction de leur occupation ou en anticipant un pic de fréquentation au restaurant d’entreprise, estime-t-il. Si on croise ces données avec des données RH comme l’absentéisme, on peut en tirer des enseignements pour améliorer l’expérience collaborateur. Des modèles prédictifs permettraient aussi d’étudier les habitudes de collaboration des équipes pour anticiper leurs besoins. »

Le bureau mobile du télétravailleur

Pour uniformiser l’expérience collaborateur en mode hybride, l’entreprise doit aussi professionnaliser le poste du télétravailleur. Fini le bricolage des débuts de la crise de la Covid-19 où le collaborateur se servait du PC familial faute de mieux. A la fois ultra léger, à forte autonomie et robuste, l’ordinateur portable doit assurer les aller-retours entre le domicile et le bureau.

Le recours intensif de la visioconférence requiert, par ailleurs, un équipement audio et vidéo qualitatif garantissant un confort d’usage comme un micro-casque avec réduction du bruit ambiant, une station d’accueil pour smartphone ou une barre de collaboration.

Sébastien Gayat – Directeur de la stratégie digitale de Perial AM

« Avec le travail hybride, le BYOD – qui était passé de mode – se généralise », constate Sébastien Gayat, directeur stratégie digitale de Perial AM.

A côté de l’accès wifi guest classique pour les invités, Perial AM a ainsi mis en place un accès wifi guest employé permettant à ce dernier de connecter ses équipements personnels en toute autonomie.

Plus généralement le travail hybride nécessite côté IT de repenser l’architecture estime Sébastien Gayat. « L’entreprise était jusqu’à présent une zone de confiance, un environnement sanctuarisé retranché derrière un pare-feu. » Avec l’éclatement des modes de travail, il faut, selon lui, repenser l’approche sécuritaire et adopter une architecture zero trust.

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