Alors que la mission d’expertise pilotée par Pierre Collin et Nicolas Colin appelle à de nouvelles règles fiscales dans son rapport remis à Bercy en janvier, l’Association française des éditeurs de logiciels et solutions Internet (AFDEL) rejette le principe d’une fiscalité spécifique ciblant le numérique.
Dans un document de 25 pages rendu public mardi – « Fiscalité du numérique : Poursuivre un objectif d’équité sans instaurer de régime d’exception » –, l’organisation présidée par Jamal Labed précise son point de vue.
L’AFDEL craint que les tentatives d’instauration de nouvelles taxes sectorielles ne se concrétisent à la faveur du débat sur l’optimisation fiscale des grands groupes du numérique, essentiellement des poids lourds américains tels que Google et Microsoft.
Or, la pratique de l’optimisation fiscale concerne de nombreuses entreprises d’envergure internationale, quel que soit leur secteur d’activité. « Cette réalité est avant tout le fait des cadres réglementaires mis en place par les gouvernements européens par le passé », estime l’organisation française du logiciel.
La question de la fiscalité des acteurs du numérique n’est pas une question « d’impunité fiscale », mais « d’équité » entre entreprises qui ne peuvent bénéficier selon leur taille et leur localisation des mêmes conditions fiscales. « Mais elle ne doit pas constituer un enjeu entre l’économie numérique et l’économie traditionnelle », précise l’AFDEL.
Pour l’association, « il serait judicieux de ne pas instaurer trop précipitamment une législation nationale sectorielle sur ce sujet, afin de permettre l’adoption de règles harmonisées au niveau de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économique), ou a minima de l’Europe ».
L’AFDEL, qui s’inquiète également d’une potentielle déstabilisation des dispositifs d’aide publique à l’innovation (crédit impôt recherche – CIR ; jeune entreprise innovante – JEI), juge que les différents projets de taxes spécifiques à la filière procèdent souvent « de raisonnements archaïques » assimilant l’économie numérique à une économie « prédatrice ».
Le numérique, insiste l’Association, est en fait à l’origine « d’une formidable création de valeur ». Ce moteur « contribue au quart de la croissance nationale et représente plus d’un million d’emplois directs en France ».
Pour l’AFDEL, ce n’est pas « une fiscalité prétendument favorable » qui explique le succès de l’écosystème numérique, mais la forte contribution de ses acteurs à l’innovation, les services à haute valeur ajoutée proposés et les nouveaux usages induits. En outre, l’économie numérique est une économie du risque.
L’AFDEL appelle donc les pouvoirs publics à suspendre toute mesure nationale qui aboutirait à une fiscalité pénalisante risquant de dissuader l’investissement, freiner les ardeurs des PME et limiter la compétitivité du pays.
Elle invite, en revanche, l’administration fiscale et le ministère en charge de l’économie numérique à « conserver le souci de la stabilité et de l’attractivité fiscale ».
Enfin, l’AFDEL recommande aux autorités de proposer des politiques industrielles susceptibles de donner naissance à des acteurs économiques mondiaux et de soutenir les concertations internationales sur l’évolution de la fiscalité.
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