Avis de tempête chez Facebook. Révélée par un lanceur d’alerte, l’utilisation frauduleuse des données de 50 millions de ses utilisateurs britanniques et américains, par son prestataire Cambridge Analytica, a déjà eu une conséquence directe sur son cours de bourse.
Avec une baisse de 7 % le 19 mars, le leader mondial des réseaux sociaux a perdu près de 30 milliards $ en une séance. Mais cet accident financier ne devrait pas être le plus impactant. C’est sur le terrain de la confiance des utilisateurs et des pouvoirs politiques que le défi sera le plus important.
La réaction ne s’est pas faite attendre du côté de Bruxelles. La Commission européenne va demander des « clarifications » par la voix de Vera Jourova, la commissaire en charge de la protection des données personnelles.
Les voix s’élèvent aux Etats-Unis sur fond d’instrumentalisation des utilisateurs de Facebook lors de l’élection de Donald Trump. “On est en train d’ouvrir le couvercle de la boîte noire des pratiques de Facebook en matière de données, et le tableau n’est pas joli à voir”, relève Frank Pasquale, professeur de droit à l’Université du Maryland et spécialiste de l’utilisation des données, cité par Reuters. Plusieurs représentants ont demandé que Mark Zuckerberg vienne témoigner en personne devant une commission du Sénat.
Si Facebook a annoncé la suspension de ses activités avec Cambridge Analytica, depuis la révélation de l’affaire, on apprend que la société est financée par Robert Mercer, un homme d’affaires américain qui est l’un des principaux donateurs du Parti républicain.
Selon le New York Times et The Observer, Cambridge Analytica aurait utilisé les millions de données, collectées depuis 2014, pour élaborer un logiciel permettant de prédire et d’influencer le vote des électeurs. On découvre qu’elle a travaillé pour la campagne présidentielle de Donald Trump en 2016 et pour la campagne du groupe pro-Brexit « Leave.EU » au Royaume Uni.
Face à la tempête Facebook nie toute responsabilité. Sa version des faits implique un professeur de psychologie de Cambridge University qui aurait en 2015 transféré les données des utilisateurs consentant à Cambridge Analytica pour une application de tests psychologiques qu’il avait créé. Pour le réseau social, il s’agit donc d’un détournement de l’usage des données mais aucunement d’un vol.
Parole contre parole, l’enjeu est désormais sur le terrain de la confiance des 2 milliards d’utilisateurs actifs. Vont-ils ralentir leur utilisation ? Vont-ils se tourner vers une alternative ? S’il est trop tôt pour observer un quelconque effet « Cambridge Analytica », Facebook va devoir donner des gages à ses membres et aux régulateurs internationaux sur le respect de leurs données.
David Carroll, professeur de droit de l’université de New-York dont les données ont été utilisées dans cette affaire, a porté plainte devant la justice britannique.
La première plainte d’une longue série ? On peut aussi anticiper une ou plusieurs « class action » dans les prochains jours avec des lourdes répercussions financières pour Facebook.
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