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Le code source des logiciels de l’administration librement accessible

En janvier 2015, la Commission d’accès aux documents administratifs (Cada) a émis un avis favorable à la communication par Bercy du code source d’un logiciel (calculateur d’impôts) produit par ses soins. Cet avis a été confirmé par le tribunal administratif de Paris dans une décision rendue le 18 février 2016, publiée le 10 mars, et repérée par NextInpact et l’April. Pour le tribunal, le code source d’un logiciel public est bien un document administratif auquel les administrés peuvent accéder.

Document administratif communicable

Dans sa décision, le tribunal administratif a rappelé que l’accès au code source n’est pas exclu par la loi du 17 juillet 1978 relative à la liberté d’accès aux documents administratifs. Et a réfuté l’argument de la Direction générale des finances publiques (DGFiP), argument selon lequel cette mise à disposition serait contraire à la directive européenne 2003/98/CE modifiée par la directive 2013/37/CE portant sur les principes de réutilisation des informations du secteur public. Le tribunal a par ailleurs estimé que le caractère évolutif du logiciel n’empêche pas la communication car « chaque version du code source d’un même programme informatique revêt le caractère de document administratif achevé et peut être communiqué dans cet état. ».

Le tribunal administratif a donc décidé d’annuler la décision implicite de refus de communication du code source d’un logiciel de simulation de l’impôt sur le revenu des personnes physiques. Et « enjoint au ministre des finances et des comptes publics à communiquer, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement, le code source du logiciel sollicité. » Comment en est-on arrivé là ?

Bras de fer autour du code source

Au printemps 2014, un étudiant en économie a effectué un stage de deux mois auprès de la mission Etalab du Secrétariat général pour la modernisation de l’action publique (SGMAP). Cellule chargée, entre autres choses, du développement d’OpenFisca, un logiciel de simulation du système socio-fiscal français (impôts, cotisations, prestations, etc.). Dans ce cadre, l’étudiant devait coder les niches fiscales de l’impôt sur le revenu sur une période donnée, explique-t-il dans un billet du forum d’Etalab. Comme ce code devait déjà exister au sein de l’administration fiscale, il a demandé à la DGFiP le code source du programme (calculateur). Et ce pour le réutiliser dans ses travaux.

La DGFiP a pris son temps avant de refuser. Le demandeur a donc saisi la Commission d’accès aux documents fin novembre 2014. Dans son avis rendu le 8 janvier 2015, la Cada a estimé que « les fichiers informatiques constituant le code source sollicité, produits par la Direction générale des finances publiques dans le cadre de sa mission de service public, revêtent le caractère de documents administratifs, au sens de l’article 1er de la loi du 17 juillet 1978 ». En conséquence, il sont communicables à ceux qui le demandent, dès lors que cela ne porte pas atteinte à la défense nationale, à la sûreté de l’État, à la recherche d’infractions fiscales et douanières, et aux droits des tiers.

Loi Numérique et hackathon fiscal

Malgré l’avis favorable de la Cada, Bercy a continué à jouer la montre… L’étudiant s’est alors tourné vers le tribunal administratif. Celui-ci a examiné la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement les 1er juin et 18 novembre 2015. Soit au moment où Axelle Lemaire présentait son projet de loi pour une République numérique, dans la foulée d’une consultation citoyenne. Le texte, qui inclut un amendement sur le droit d’accès au code source (considéré comme un document administratif communicable), a été adopté par les députés le 26 janvier 2016.

Trois jours plus tard, soit avant que le tribunal ne rende sa décision, Bercy a indiqué au demandeur sa volonté de lui transmettre le code source sollicité. Le 9 mars, la mission Etalab a dit que l’administration fiscale va ouvrir à tous le code source de son calculateur d’impôts sous licence libre. Cette ouverture sera accompagnée d’un hackathon (#CodeImpot) les 1er et 2 avril. Il aura fallu vingt mois d’un bras de fer entre l’administration et un citoyen (et ses soutiens) pour parvenir à ce résultat.

Lire aussi :

La DSI de l’État promeut son forum sur le logiciel libre

La communication du code source des logiciels de l’Etat fait débat

crédit photo © bensliman hassan / shutterstock.com

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