IA cloud : le terrain de bataille des offres sectorielles

IA cloud Magic Quadrant 2023

Régulièrement pointés par le passé pour leur pricing, les têtes de pont du Magic Quadrant de l’IA cloud se distinguent plus positivement cette année. Leurs stratégies respectives se verticalisent… à des rythmes variables.

L’IA « sectorielle », une réalité désormais tangible ? Sous l’angle des services cloud à l’adresse des développeurs, Gartner répond par l’affirmative.

Le cabinet américain souligne en tout cas que les fournisseurs ont nettement étendu leurs catalogues respectifs de modèles « verticaux ». Et amélioré le support qui va avec. Il en fait part dans son dernier Magic Quadrant consacré à ce segment de marché.

À l’en croire, quatre points-clés font désormais la différence entre ces fournisseurs. Nommément :

> Le niveau de maturité dans le domaine de l’IA « responsable »
> Les capacités génératives
> Le support linguistique et géographique
> La flexibilité de déploiement des services

Par rapport à l’édition précédente, les critères fonctionnels à respecter pour figurer au Quadrant n’ont pas changé. Ils sont toujours regroupés sous la bannière autoML, avec cinq angles : préparer des données, les enrichir, concevoir des modèles, les gérer et les déployer. Les services complémentaires dans le domaine du langage et de la vision sont toujours facultatifs.

Le paysage concurrentiel ici dépeint correspond à la situation en mars 2023. Les fournisseurs sont jugés sur deux axes. L’un prospectif (« vision »), centré sur les stratégies (sectorielle, géographique, commerciale, marketing, produit…). L’autre centré sur la capacité à répondre effectivement à la demande (« exécution » : expérience client, performance avant-vente, qualité des produits/services…).

Sur l’axe « vision », le classement est le suivant :

  Fournisseur
1 Microsoft
2 AWS
3 H2O.ai
4 Google
5 IBM
6 Alibaba Cloud
7 Clarifai
8 Oracle
9 Baidu
10 Tencent
11 Huawei Cloud

 

Sur l’axe « exécution » :

  Fournisseur
1 AWS
2 Microsoft
3 Google
4 IBM
5 Baidu
6 Alibaba Cloud
7 Tencent
8 H2O.ai
9 Huawei Cloud
10 GitHub
11 Sonatype

 

Une mention pour l’IA de Hugging Face

Hugging Face, cette société « au sang français », ne figure pas au Quadrant. Faute notamment de respecter les critères économiques imposés (au moins 15 M$ de CA sur ce segment hors services professionnels et au moins 75 grandes entreprises clientes). Elle a toutefois droit à une « mention honorable ».

Distingué l’an dernier, le français Prevision.io sort du Quadrant cette année. En cause, son acquisition par Density, qui n’évolue pas sur ce marché.

D’une année sur l’autre, les écarts se resserrent entre fournisseurs. Chez les « leaders », qui sont toujours les mêmes, Microsoft est le seul stable sur les deux axes. AWS progresse un peu en exécution, davantage en vision. Dynamique inverse pour Google. IBM recule pour sa part nettement sur chaque axe.

Microsoft doit avancer sur l’IA « sectorielle »…

L’IA « sectorielle » n’est pas le fort de Microsoft. En tout cas par rapport à ses principaux concurrents. Idem pour l’expérience client : le groupe américain doit, entre autres, mieux répondre aux demandes d’intégration de fonctionnalités. Gartner souligne par ailleurs que ses SLA ne garantissent pas de latence. Et que le dédommagement pour une disponibilité sous les 99 % est moins « généreux » que chez la concurrence.

Le pricing, qui fut un temps un point faible de l’offre de Microsoft, est désormais salué par Gartner. Comme, plus globalement, la stratégie commerciale de l’éditeur (version gratuite d’Azure AI, autoML sans surcoût hors frais d’infra, paiement à l’usage pour les petites équipes…).
Au rang des points positifs, il y a aussi l’étendue du catalogue de modèles et du réseau de partenaires. Ainsi que la capacité à transformer les innovations en produits plus rapidement que la concurrence.

… comme Google

Dans plusieurs éditions récentes de ce Magic Quadrant, Microsoft avait bénéficié d’un bon point pour la flexibilité des options de déploiement. C’était le contraire pour Google… qui a semble-t-il corrigé le problème. Les « points noirs » qu’avance Gartner concernent désormais :

– L’expérience client (encore en maturation ; investissement en cours sur ventes et support)
– La stratégie marketing (moins « agressive » qu’il fut un temps, possiblement en conséquence du discours public)
– La stratégie sectorielle (notoriété « en construction »)

Google a pour lui une capacité à répondre aux tendances du marché (offre Vertex AI, outils low code). Ainsi que son pricing et sa capacité d’innovation (Gartner mentionne DeepMind, comme par le passé).

AWS s’améliore sur le pricing ; pas sur l’innovation

Naguère vanté pour sa capacité d’innovation sous la bannière SageMaker, AWS n’ a désormais plus le droit à une telle remarque. C’est même devenu un point faible. Au même titre que la portabilité (peu d’options pour qui cherche à déployer en multicloud). Et, dans une moindre mesure, les composantes interprétabilité/explicabilité des modèles (Clarify et Model Monitor).

AWS s’est, en revanche, amélioré sur le pricing. Cet aspect ne lui est en tout cas plus reproché. La filiale d’Amazon se distingue aussi sur sa couverture géographique en termes de zone de disponibilité. Et sur la capacité à flécher les utilisateurs vers les bonnes solutions, en particulier avec son AI Use Case Explorer.

IBM compétitif malgré des gaps

Point positif historique d’IBM au Quadrant, la qualité produit le reste. Cette année, Gartner met l’accent sur la compétitivité des services de vision (analyse vidéo en premier lieu) et sur les fonctionnalités d’IA « responsable ». Il salue en parallèle l’usabilité des outils, la flexibilité de déploiement et le couple support technique/SLA.

On portera attention au fait que la stratégie commerciale d’IBM reste pilotée par les partenariats. Ce modèle essentiellement indirect a valu, pendant plusieurs années, un point de vigilance à Microsoft dans le Quadrant de l’IA cloud.
Autre point d’attention : certains vides dans l’offre au niveau de l’annotation et de la génération d’images, de la création de données synthétiques et de la conception automatisée de modèles de vision. Certaines options de déploiement « non standard » peuvent par ailleurs avoir des tarifications floues.

Photo d’illustration © immimagery – Adobe Stock