Big Data, IoT, HPC… L’Etat livre les technologies clés pour 2020

Données massives, Internet des objets et supercalculateurs sont au coeur du rapport Technologies clés 2020. C’est un guide opérationnel pour la nouvelle France industrielle, selon Bercy.

François Hollande et ses ministres ont célébré lundi 23 mai l’anniversaire de la nouvelle France industrielle (NFI). Un programme initié en 2013 par l’ancien patron de Bercy, Arnaud Montebourg, mais recentré en mai 2015 sur 9 marchés prioritaires par l’actuel ministre de l’Economie, Emmanuel Macron. L’événement a été l’occasion de réaffirmer l’engagement du gouvernement en faveur de l’industrie du futur (du soutien de centaines de projets à hauteur de 1,9 milliard d’euros à la reconduction/extension de la mesure de surinvestissement fiscal permettant aux entreprises d’amortir des biens à 140 % de leur valeur). Et de présenter le guide opérationnel de la NFI, à savoir : l’étude de 640 pages « Technologies clés 2020 – Préparer l’industrie du futur ».

Pilotée par la Direction générale des entreprises (DGE) à Bercy, l’édition 2016 de cette étude prospective recense 47 technologies clés pour la compétitivité et l’attractivité de la France dans 9 domaines d’application. Et les technologies numériques, du Big Data à l’Internet des objets, en passant par l’intelligence artificielle, la 5G, les supercalculateurs et les réseaux intelligents, forment le socle du dispositif. Les enjeux de sécurité concernent toutes ces technologies.

Données massives (Big Data)

La valorisation de mégadonnées (Big Data) est une priorité. « En France, le marché de la valorisation et de l’intelligence des données massives est évalué à seulement 387 millions d’euros en 2013 par IDC, mais est considéré comme particulièrement prometteur avec un taux de croissance de 40 % par an (logiciels et services) », indique l’étude. Et devrait même atteindre 9 milliards d’euros en 2020 et un potentiel de 137 000 emplois en France, selon le plan dédié de la NFI. Le marché mondial dépasserait les 40 milliards d’euros en 2018.

Sont autant d’atouts pour la France : « le positionnement d’acteurs français (Atos, Thales, Criteo, Orange, Dataiku…) sur cette technologie clé », « un système académique particulièrement performant (des grandes écoles comme Télécom ParisTech et l’ENSAE, aux centres de recherche publique CNRS, INRIA, CEA…) dans les disciplines sur lesquelles s’adossent la valorisation et l’intelligence des données massives », ainsi que le « dynamisme de l’action publique dans ce domaine », en témoigne la création de la mission Etalab en 2011. Ses faiblesses : « un manque de compétences analytiques et notamment de ressources de data scientists », ainsi que « le retard des entreprises françaises dans l’intégration du Big Data ».

La réglementation européenne sur la protection des données à caractère personnel peut être considérée comme une opportunité. Dans la compétition mondiale, cependant, les États-Unis et leurs GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon) dominent largement le marché des solutions Big Data. La France et ses entreprises sont loin derrière, mais tout de même dans la moyenne mondiale.

Internet des objets (IoT)

L’Internet des objets est un marché mondial estimé à plus de 1 500 milliards d’euros en 2020. Des entreprises françaises émergent et se développent à l’international. C’est le cas de fabricants d’objets connectés (Netatmo, Parrot, Withings etc.), d’opérateurs de réseaux dédiés à l’IoT (Sigfox) et de plateformes (Actility…). Mais la France accuse un retard sur les procédés et capacités de fabrication « dans un environnement où la production se fait massivement dans les pays à bas coût (Chine) ».

Et le défi majeur consiste, selon le rapport, à innover tout en respectant la confidentialité, la liberté individuelle et le respect de la vie privée.

Intelligence artificielle

Recherche, analyse prédictive, assistants personnels, jeux vidéo, véhicules autonomes, robotique… Sont autant de domaines d’application pour l’intelligence artificielle (IA). Une fois de plus les centres de R&D français sont des atouts pour la France dans ce domaine. Sur ce marché, la France peut s’appuyer sur ses start-ups de l’IoT et des acteurs clés actifs dans les environnements supercalculateurs et logiciels embarqués (Airbus, Dassault Systèmes…), mais elle a peu de « leaders IoT affirmés » dans les loisirs et la culture. Les États-Unis dominent une fois de plus.

Supercalculateurs

Le cabinet Market Search Media prévoit que le marché des supercalculateurs pourrait atteindre 44 milliards de dollars d’ici à 2020, alors qu’il pesait 10,3 milliards de dollars en 2012, selon IDC. Les acteurs académiques français, Inria en tête, sont très actifs dans le domaine du calcul intensif (HPC). Et la France fait partie des 5 leaders mondiaux des supercalculateurs avec Atos et sa marque Bull. Mais Atos détient une faible part de marché dans le monde (3,6 %) face à HP et IBM. Par ailleurs, aucun acteur français ne figure parmi les fournisseurs de composants du secteur…

La concurrence est rude. « Les États-Unis (HP, IBM, Cray…) et la Chine (Tianhe-2) avancent plus vite, et débloquent beaucoup de fonds pour le développement des futurs supercalculateurs », rappelle l’étude.

Réseaux intelligents

Le chiffre d’affaires global du marché des réseaux électriques intelligents (REI) ou smart grids (compteurs communicants, infrastructures et applications associées) a été de 44,1 milliards de dollars en 2014 et devrait atteindre 70,2 milliards de dollars en 2023, selon Navigant Research. À lui seul, le marché français cumulé des compteurs communicants électriques (Linky) et à gaz (Gazpar) devrait atteindre 6 milliards d’euros d’ici 2022 (source : Greenunivers – rapport CleanTech 2015).

L’expertise dans la conception de réseaux, et des acteurs présents sur toute la chaîne de valeur, sont des atouts français. Mais « la protection des données est perçue comme insuffisante », et la France pourrait être bousculée par l’arrivée sur le marché d’acteurs internationaux du numérique.

Infrastructures 5G

La cinquième génération (5G) de réseaux mobiles doit succéder à la 4G vers 2020. En France, les acteurs sont mobilisés (dont l’équipementier Alcaltel-Lucent, l’opérateur historique et sa division R&D Orange Labs, et l’institut IRT B-Com) via le consortium européen 5G PPP (Public Private Partnership Association), notamment. Par ailleurs des start-ups et PME « pourront jouer un rôle important auprès des opérateurs et équipementiers dans la définition de la norme 5G et le déploiement des insfrastructures », note le rapport. En théorie… La 4G sous-utilisée en Europe aujourd’hui (10 % des Européens l’utilisent), sera active jusqu’en 2030, ce qui pourrait retarder le démarrage commercial de la 5G.

Enfin, notons que pour l’État français, la cybersécurité est une priorité nationale. Elle « concerne non seulement les enjeux vitaux pour la nation, mais également les entreprises et administrations ». Par contre, le rapport n’accorde pas un chapitre dédié au Cloud, il est vrai que les deux Cloud souverains Cloudwatt et Numergy ont été absorbés par leurs actionnaires. Il existe néanmoins un tissu d’entreprises, comme OVH, Ikoula, Outscale, Cheops Technology, qui mérite d’être mis en avant.

Lire aussi :

Coup de pouce fiscal pour les serveurs, la fibre et le HPC
Industrie du futur : Emmanuel Macron veut accélérer la mutation numérique de la France

crédit photo © patrice6000 / shutterstock.com