Damien Chew (FitchRatings) : « Le câble prendra l’avantage sur le très haut débit en Europe »

Damien Chew, analyste senior director TMT chez FitchRatings

Face à des opérateurs comprimés entre des marges réduites, des revenus en baisse et des investissements en hausse, les câblo-opérateurs pourraient prochainement dominer le marché du très haut débit fixe, selon l’analyste FitchRatings.

« Les câblo-opérateurs avancent plus vite que les opérateurs sur le fixe. » À en croire Damien Chew (notre photo), senior director corporates, telecom, media et technology (TMT) au cabinet FitchRatings, l’avenir des câblo-opérateurs s’annonce plus souriant que celui des opérateurs traditionnels sur le marché du très haut débit fixe en Europe de l’Ouest.

Plusieurs facteurs justifient cette analyse. À commencer par l’infrastructure, aujourd’hui quasiment en place pour les « câblos ». « Ils sont en fin de mise à niveau de leur réseau (en DOCSIS 3) pour supporter les très hauts débits alors que les opérateurs doivent investir dans la fibre ou des technologies alternatives comme le VDSL », indique l’analyste.

Le câble bien implanté en Europe (source FitchRatings)
Le câble bien implanté en Europe (source FitchRatings)

Et les investissements nécessaires sont disproportionnés d’un modèle à l’autre. Alors que le coût de raccordement d’un foyer en fibre s’élève, en moyenne, à 1000 euros, et 150 euros pour du VDSL, le raccordement d’une prise câble pour le très haut débit s’établit entre 100 et 200 euros, a calculé FitchRatings.

Le non-sens des investissements

Ensuite, déjà en place, le câble est simple à mettre à jour alors que le déploiement d’une fibre reste compliqué, surtout s’il nécessite des travaux de génie civil. Enfin, les marges des câblos restent plus élevées que celles des opérateurs désavantagés par des investissements colossaux à assumer dans le fixe et le mobile.

« À raison de 5 euros mensuels de plus par foyer sur la facture [par rapport à l’ADSL], le retour sur investissement ne fait pas sens et dépasse les 10 ans. Sauf, peut-être, sur les déploiements à 200 ou 300 euros, mais il reste le risque concurrentiel », analyse Damien Chew. D’où la priorité de cibler les zones denses, mais aussi le rôle du régulateur pour encadrer les besoins de mutualisation des réseaux fibrés.

Sur le très haut débit, « nous pensons que le câble prendra l’avantage en Europe », conclut Damien Chew.

Sauvés par le quadruple play et la 4G ?

Les opérateurs peuvent-ils néanmoins tirer avantage de l’intégration fixe-mobile à travers les offres quadruple play ? Damien Chew n’y croit pas trop. « Il n’y a pas d’avantage technologique (pour les opérateurs) car ce sont des réseaux séparés, et au-delà des opérations marketing il n’y a pas vraiment d’économies d’échelle à réaliser. »

Certes, les offres fixe-mobile ont tendance à emprisonner le client chez le même fournisseur qui profite donc d’une base stable. Mais, selon l’analyste, les utilisateurs ne sont pas forcément attirés par ce modèle. Sauf à proposer des réductions importantes à travers les offres quadruple play, ce qu’a fait Telefonica. Mais avec pour conséquence de réduire la marge.

Quant à la 4G, « il y a un risque que la plus value du très haut débit mobile disparaisse rapidement par rapport à la 3G », note l’analyste. Et de prendre pour exemple Free Mobile, en France, qui pourrait proposer ses services 4G au même prix que la 3G. L’avenir des opérateurs semble visiblement bien sombre en Europe.


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