Cybersécurité : l’avenir passe par les femmes

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Rendre la filière IT attrayante aux filles est évidemment important, mais ne suffira pas. Les entreprises doivent afficher clairement et fortement leur volonté de les recruter. La féminisation, base de la parité, de l’équilibre et de la stabilité des équipes, ne se fera qu’à cette condition.

Dans la cybersécurité (et l’IT dans son ensemble), l’absence d’un nombre équilibrant de femmes est une évidence. Et le constat se fait dès les études secondaires. Rendre la filière IT attrayante aux filles est évidemment important, mais ne suffira pas. Les entreprises doivent afficher clairement et fortement leur volonté de les recruter. La féminisation, base de la parité, de l’équilibre et de la stabilité des équipes, ne se fera qu’à cette condition.

Déclarée grande cause nationale du quinquennat par le Président de la République, l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes est un véritable défi pour les entreprises et passe par la mobilisation de tous. La preuve ? La création de l’Index de l’égalité salariale Femmes-Hommes par le Ministère du Travail.

Les entreprises sont désormais tenues de calculer chaque année, à partir d’indicateurs déterminés en fonction de leur taille, l’écart de rémunération femmes-hommes, l’écart de répartition des augmentations individuelles, l’écart de répartition des promotions, le nombre de salariées augmentées à leur retour de congé de maternité, la parité parmi les 10 plus hautes rémunérations. Cet index est rendu public et transmis à l’inspection du travail.

Dans ce cadre, l’entreprise où je travaille vient d’annoncer un résultat atteignant 94 points sur 100, prouvant ainsi que l’égalité salariale est une de ses priorités. J’en suis plutôt fière.
Mais allons plus loin dans l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes. Une vraie politique égalitaire repose sur l’accès des femmes aux postes à responsabilité et à tous les niveaux de management ainsi que la volonté d’une représentation équilibrée des femmes et des hommes dans tous les métiers et notamment les métiers techniques.

Ici, l’adage à travail égal, salaire égal prend tout son sens. Précisons cependant que les inégalités salariales sont moindres dans l’IT que dans d’autres activités. Tous secteurs confondus et à profil identique, une femme gagnait en moyenne 8,5% de moins qu’un homme en 2013. L’écart est de 5,5% dans l’IT, selon une étude de l’Apec.

Parité et égalité, un enjeu pour l’IT

Malgré cet avantage, les chiffres sont éloquents. Peu de femmes travaillent dans le domaine numérique. En 2017, elles n’occupaient en France qu’un tiers des emplois de ce secteur et on ne comptait que 9% de dirigeantes de start-ups. Recruter des talents dans la cybersécurité et plus généralement dans le domaine IT est, nous le savons, difficile. Mais recruter des femmes est encore plus difficile. La raison en est simple : le faible nombre d’élèves féminines dans les universités et les écoles d’ingénieurs IT. Les femmes bouderaient-elles ces métiers ?

Peu de femmes choisissent la filière IT. On peut s’interroger sur les raisons. Je crois que la vraie question n’est pas de se demander pourquoi les filles n’aiment pas l’informatique, mais plutôt pourquoi la passion de la maîtrise de l’ordinateur, depuis le début des années 1980, touche surtout les garçons. Dès leur enfance, les filles sont invitées à se détourner de l’informatique.

Isabelle Collet dans son livre “ L’informatique a-t-elle un sexe ? ” montre comment l’image masculine, “geek”, véhiculée à partir des années 1980-90, a progressivement détourné les femmes des métiers du numérique. En 2018, les femmes ne représentaient que 27,9% des effectifs des écoles d’ingénieurs.

Déjà, dans un article du Monde du 11 décembre 2007, Isabelle Collet déclarait : « Il existe encore aujourd’hui un prototype de l’informaticien dont les caractéristiques principales seraient d’être un homme, peu sociable, logique, passionné par la technique, plus à l’aise avec les machines qu’avec les humains.»

Dans le même article, Joël Courtois, Directeur d’Epita, ajoutait : « En première et en terminale S au lycée, tout est déjà joué. Les stéréotypes sont acquis et c’est terminé, le vivier s’est considérablement restreint… » Pour renverser cette tendance, il conviendrait de s’attaquer aux clichés dès le plus jeune âge afin de réduire cette quasi-exclusion liée au genre.

Casser les clichés dès l’école, faire découvrir aux filles les opportunités que présentent les différentes carrières de la Hi Tech, aiderait les élèves à s’orienter vers des métiers ouverts à tous et à toutes. Mattel l’a bien compris en créant sa Barbie « ingénieure en robotique. »

Bien sûr, chaque entreprise du secteur IT doit prendre en main ses propres actions pour féminiser ses équipes. Repérer les profils intéressants sur les réseaux sociaux et organiser des événements de recrutement ou de networking destinés aux ingénieures est un premier effort. On peut aussi élargir le vivier des recrutements en sélectionnant des candidates sur leur potentiel plutôt que sur leur parcours académique et professionnel stricto sensu, puis les faire évoluer par des formations « maison ». L’effort dans ce domaine est payant, même si cela prend du temps !

Enfin, pour sortir des stéréotypes et s’éloigner des codes masculins de la tech souvent rebutants pour les femmes, l’employeur doit adapter sa communication, utiliser un vocabulaire nouveau et proposer une image des postes à pourvoir qui ne soit pas systématiquement virilisée. Eviter les termes comme Ninja Warrior ou jeune padawan… qui parlent plus aux garçons et que l’on retrouve encore trop souvent dans les annonces de recrutement. Une évidence ? Sincèrement, il y a encore du travail !

Cette situation engendre des efforts supplémentaires pour les entreprises. Elles rentrent dans une phase où leurs offres d’emploi doivent être pro-actives et où leur volonté de recrutement doit être ouverte et large. Au-delà de l’enjeu social défendu par le gouvernement, il s’agit d’un enjeu économique, voire d’une nécessité vitale.

La cybersécurité est une nécessité pour chaque organisation, quelle que soit sa taille. Sur un marché où la pénurie des talents est récurrente et où le turn-over est énorme, comment se priver de la moitié du potentiel pour assurer la résilience en cas d’attaque ?


Auteur
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Responsable RH et Communication
I-TRACING
Justine Garcia est responsable RH et Communication chez I-TRACING
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