Ludwine Probst, Duchess : « Créer une dynamique pour que les femmes osent développer »

Ludwine Probst

Leadeuse de l’association Duchess France, Ludwine Probst présente cette structure dont l’ambition est de promouvoir les femmes développeurs.

Leadeuse de l’association Duchess France, Ludwine Probst présente cette structure dont l’ambition est de promouvoir les femmes dans le métier de la programmation. Des développeuses encore sous représentées en France, mais qui entendent monter en puissance dans l’économie numérique française

Silicon.fr : Pourquoi avoir décidé de regrouper les développeuses françaises au sein de l’association Duchess France ?

J’ai rejoint l’association Duchess France il y a deux ans parce que j’avais envie d’organiser des événements autour de technologies que je trouvais intéressantes. Aujourd’hui je suis « Leadeuse » de ce groupe et m’investis  activement dans l’évolution de cette association en définissant les visions et directions à prendre. Cette expérience est très enrichissant et j’ai la chance de rencontrer des femmes qui m’inspirent énormément par ce biais. L’association Duchess France a été créée il y a maintenant 4 ans par deux développeuses : Mathilde Lemée et Ellène Siber-Dijoux.

Duchess France est une déclinaison du Java User Group (groupe rassemblant les personnes intéressées par le langage de programmation Java) JDuchess créé aux Pays-Bas. D’autres groupes Duchess existent dans le monde entier (Suisse, Belgique,…). Au départ l’association était destinée à mettre en relation des développeuses qui codent en Java.

Aujourd’hui l’association a pris une direction un peu différente. Premièrement, l’association veut rassembler les développeuses tous langages confondus et développeurs intéressés par notre vision. Ensuite notre volonté est de mettre en avant des modèles féminins avec des parcours de développeuses, au travers d’événements mensuels tels que des workshops, des déjeuners ou des soirées.

Ce que l’on remarque c’est que beaucoup de développeuses se mettent des barrières, probablement pour des raisons culturelles, et osent moins, prennent moins de risques que les hommes. Les femmes représentent autour de 10% des développeurs et cette proportion parmi les intervenants n’est pas très souvent atteinte aux conférences techniques : il y a une “perte” à un moment. Duchess France essaye justement de pousser de nouvelles speakeuses via des séances d’entraînements et relecture d’appel à conférenciers.

En mettant des portraits de femmes de l’IT en avant nous espérons créer une dynamique et voir plus de femmes oser, se dire tout simplement “cette femme le fait, alors pourquoi pas moi ?”.

Pourquoi les femmes sont elles aussi peu nombreuses dans ces métiers ? Est-ce un désintérêt ou un simple manque d’informations ?

Il faut noter que cette inégalité n’est pas présente dans tous les pays. Par exemple en Inde ou en Tunisie c’est plutôt équilibré. Je pense qu’il y a une part culturelle qui entre en jeu en ce qui concerne les développeurs ou l’informatique en France.

L’image du développeur en France est trop souvent associée à celle d’un geek qui joue aux jeux vidéos, communique peu sauf avec son ordinateur. C’est aussi l’image que j’avais avant d’intégrer le monde de l’informatique.

C’est un cercle vicieux, mais il y a peu de filles présentes et encore moins mises en avant et trop peu de modèles féminins en France. Au final, je pense que ces préjugés et représentations de l’informatique rendent plus difficile pour une jeune fille de se projeter facilement dans un métier de développeur/codeur.

Enfin je pense que l’image des métiers de l’informatique reste encore assez flou pour beaucoup de personnes. C’était d’ailleurs mon cas : j’imaginais que coder consistait à communiquer uniquement avec un terminal noir et taper des commandes complètement incompréhensibles.

En réalité le monde de l’informatique est bien plus que cela. Je vois un côté créatif dans l’informatique, la possibilité d’innover, de faciliter le quotidien de milliers de personnes, ou encore d’informer, de divertir les gens.

Du côté des métiers de l’informatique, il y a bien sur des codeurs/développeurs back-end, front-end, mais aussi des graphistes, des designer, des intégrateurs…qui tous travaillent sur des projets informatiques et créent ensemble.

Les codeuses ont elles leur propre style ? Codez vous de la même manière qu’un homme ? Appréhendez vous les problèmes de la même façon ?

C’est une question qui m’a surprise à la première lecture. Difficile pour moi d’avoir beaucoup de recul puisque je connais très peu de développeuses et j’ai peu eu l’occasion de travailler avec elles au quotidien.

Je dirais que dans le code il y a une partie de création, qui est plus ou moins présente suivant les projets sur lesquels on travaille. S’il y a des différences, elles s’expriment peut-être à ce moment là. Y a-t-il une différence réelle entre les codeuses et codeurs ? J’aurai envie de dire qu’il y a autant de différences entre une codeuse et un codeur, qu’entre deux codeurs ou deux codeuses. Sinon, lorsque l’on code, on est amené à utiliser des patterns, des modèles, des bonnes pratiques qui donnent un cadre et une ligne de conduite aux développeurs et limitent de fait la partie créative.

Enfin en ce qui concerne l’approche dans le raisonnement ou la réflexion par rapport à la résolution de problèmes, j’aurai tendance à dire que cela dépend de la formation initiale du développeur/développeuse, de sa sensibilité, curiosité et inventivité plus que de son genre.

En matière de rémunération, votre secteur est il moins inégalitaire que les autres ?

J’ai peu de chiffres et de matière concernant cette question. Je n’ai pas entendu parler de franche inégalité depuis que je suis dans ce milieu et je n’en ai pas observé non plus.

Ce que j’ai pu remarquer, c’est que les femmes ont tendance à moins oser demander une augmentation en se disant qu’on leur en donnera une si elles le méritent. Peut-être que certaines inégalités sont accentuées à cause de ce phénomène.

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