Offshore : la fin du miracle indien ?

« America First », l’Inde ensuite ? Victime du tour de vis donné par Trump, l’offshore du sous-continent licencie.

Le « America First » de Donald Trump produit déjà ses effets… sur le sous-continent indien. La base arrière de l’outsourcing mondial n’est plus aussi fringante. Victime de l’adaptation des sociétés de services à la réforme annoncée du programme américain de visas H1-B, mais aussi du développement des logiques Devops, les services IT en Inde licencient, d’après un article du Washington Post. Selon une organisation d’employés, The Forum for IT Employees (FITE), 60 000 salariés du secteur ont ainsi perdu leur emploi ces derniers mois. « Des employés se voient attibuer de mauvaises notes dans leurs évaluations, ainsi les entreprises peuvent s’en débarrasser », explique le coordinateur du FITE pour la région de Chennai, au sud-est du pays.

Pour le patron de la société de recrutement Head Hunters, Kris Lakshmikanth, le phénomène touche également le management intermédiaire. Une première. « Habituellement, en informatique, les gens grandissent avec l’industrie. Tous les deux ou trois ans, les salaires augmentent, et tout le monde reçoit des promotions. C’est la norme. Depuis plus de 20 ans, je n’ai jamais vu les managers être licenciés. Aujourd’hui, cela se passe partout – à Pune, Bangalore ou Hyderabad », explique-t-il dans le quotidien américain. 

9,5 % du PIB de l’Inde 

Au total, l’industrie IT indienne emploie 3,5 millions de personnes et représente 9,5 % du PIB du pays. Selon le Nasscom, le syndicat des prestataires du sous-continent, l’industrie locale du BPO et de l’externalisation IT contrôlait 56 % du marché mondial de l’outsourcing en 2015, contre 52 % en 2012.

Même si le syndicat patronal tente de minimiser les licenciements récents, ceux-ci semblent directement liés à la volonté de Donald Trump de réformer le visa H1-B, dédié aux travailleurs non-américains dotés de compétences spécifiques. Une arme dont ont usé (et abusé ?) ces dernières années les TCS, Infosys et Wipro afin de faire venir aux Etats-Unis des salariés indiens pour les besoins de projets menés sur place. La volonté affichée par le nouveau président américain de fermer les vannes s’est déjà traduite par une baisse de 16 % du nombre de visas H1-B. Des sociétés indiennes comme Infosys ont démarré le recrutement de salariés américains, se pliant aux injonctions de Trump de créer des emplois localement.

Notons également que la vague du Devops et des projets agiles, qui supposent une grande proximité entre les équipes métiers et les informaticiens chargés du développement, n’est guère favorable à l’offshore dans des pays lointains, qui par essence ralentit les échanges. Un second facteur qui met l’offshore indien sous pression.

A lire aussi :

Superpuissance de l’outsourcing, l’Inde contrôle 56 % du marché mondial

Capgemini : un modèle offshore de plus en plus rentable… jusqu’à quand ?

Crédit photo : monotoomono / Shutterstock