Open World : Oracle s’engage à fond sur le cloud

Après avoir fustigé des technologies immatures et l’inutilité du multitenant, la société de Larry Ellison se positionne désormais en acteur incontournable du cloud. La manifestation monstre de l’éditeur, Open World, ponctuée de nombreuses annonces, a enfin permis d’éclaircir la stratégie nuageuse du groupe.

La place de leader mondial des bases de données et des applications procure des obligations par rapport à ses clients, dont celle de maintenir une avance technologique. Pourtant Oracle n’a pas semblé très pressé de déployer ses offres cloud. Aujourd’hui, l’éditeur multiplie les annonces et passe à la vitesse supérieure, en précisant son positionnement.

« Intégrer la base de données au niveau de la plate-forme et non des applications illustre un choix différenciateur majeur de la stratégie cloud d’Oracle, » insiste Thomas Kurian, vice-président exécutif en charge du développement produits chez Oracle. « Cela démontre combien nous estimons que la donnée reste l’élément fondamental au cœur de l’informatique d’entreprise. »

Quant au délai de réflexion, Steve Miranda, le vice-président exécutif en charge du développement des applications, l’explique par cette formule : « Chez Oracle nous prenons notre temps, afin de proposer des solutions cloud opérationnelles robustes et intégrées simplifiant la vie de l’entreprise. Quitte à attendre deux ou trois ans, afin de tester et éprouver tout cela avant de le rendre disponible. Notre philosophie consiste à proposer une plate-forme unique et sécurisée où les utilisateurs peuvent se connecter une seule fois et naviguer entre les applications communicantes en toute sécurité (SSO).»

Et Rex Wang, vice-président marketing produits et cloud chez Oracle, ajoute : « Nous conservons notre philosophie best-of-breed consistant à proposer les meilleures solutions logicielles et cloud non seulement sur nos matériels, mais aussi sur les matériels concurrents. »

De l’IaaS et bien plus encore

Fort de sa présence dans la plupart des cloud à travers le monde (au minimum avec sa base de données), Oracle affiche une stratégie conquérante et volontariste en annonçant trois services clés favorisant l’accès aux données et aux applications Java dans le cloud : Oracle Database as a Service, Oracle Java as a Service, et Oracle Infrastructure as a Service.

Venant enrichir l’offre Oracle Cloud Platform Services, Oracle Database as a Service offre un contrôle complet d’instances de la base de données (sous Oracle VM) supportant toute application liée à la base de données, tout langage ou toute méthode de connexion. Extension supplémentaire, Oracle Java as a Service apporte également une administration complète des clusters de serveurs Oracle WebLogic (sous Oracle VM) et des applications Java qui s’y exécutent. Outre une très haute disponibilité, de nombreuses tâches sont automatisées pour ces deux solutions : mises à jour, sauvegardes et restaurations, clonage, etc.

Plus près encore de l’infrastructure, l’éditeur propose enfin Oracle Cloud Infrastructure as a Service incluant des services d’infrastructure cloud de puissance de calcul (compute ou serveur) et de stockage. Le service Compute  (ou Elastic Compute), compatible Openstack Nova (voir plus loin dans l’article) met à disposition des processeurs virtuels utilisés pour déployer les packs Oracle Virtual Assembly Builder et les templates de VM Oracle. Le service Object Storage, compatible Openstack Swift (support de Java et des API REST API, voir plus loin dans l’article), est un  stockage de type direct attached (DAS), network attached, ou dédié base de données. Totalement persistant, il est portable entre des cloud Oracle.

« Nous devions proposer des offres IaaS pour nous positionner sur ce créneau, » affirme Rex Wang. « De plus, de nombreux utilisateurs ou éditeurs nous réclament de pouvoir accéder à l’infrastructure pour créer leurs propres extensions ou applications. »

Outre ces services cloud, l’éditeur a également annoncé Business Intelligence Cloud (service d’analyse et de visualisation de données avec chargement, modélisation, analyse, gestion des applications…) ; Documents Cloud avec partage de fichiers en self-service favorisant collaboration, synchronisation des terminaux clients et intégration entre application sur site et cloud ; Mobile cloud pour apporter la mobilité aux applications avec une sécurité adaptée ; Database Backup Cloud afin de sauvegarder/restaurer ou répliquer les bases Oracle sur le cloud de l’éditeur ; ou encore le service Billing and Revenue Management Cloud pour les entreprises souhaitant s’assurer des revenus via leurs services cloud.

Enfin, l’éditeur a annoncé de multiples mises à jour de ses cloud CX (Customer Expérience) ERP, Human Resources (ressources humaines) et Talent Management (gestion des talents).

Une place de marché prometteuse

Une des clés du succès d’Oracle repose sur l’écosystème développé autour de sa base de données et de ses applications. L’éditeur a même érigé cette approche en modèle, ce qui lui permet aussi de maintenir de nombreuses lignes de produits, même plusieurs années après leur rachat. Les utilisateurs (et les concurrents…) connaissent d’ailleurs parfaitement l’énorme catalogue d’applications Oracle (de partenaires ou maison), véritable bottin de l’application d’entreprise.

Salesforce ou Microsoft (avec Azure) ayant lancé leur place de marché d’applications d’entreprise,  alors Oracle se devait de se positionner rapidement sur le créneau. C’est chose faite avec Oracle Cloud Marketplace.

Destinée aux partenaires, cette place de marché leur permet de publier leurs applications afin de les faire découvrir aux utilisateurs pour les évaluer ou les déployer très simplement en production, sur le cloud Oracle (en cloud public ou privé).

Actuellement, les entreprises trouveront déjà des applications de gestion de réseaux, de lead génération, de qualité des données, de gestion de contrats, etc.

Bien entendu, un système de notation et de commentaires sera disponible aux utilisateurs afin de partager leurs retours d’expérience, souvent très instructifs pour les néophytes.

La place de marché incarne un nouveau canal de distribution pour les partenaires Oracle, qui peuvent également bénéficier de l’intégration native avec les applications SaaS Oracle. En effet, les briques de la plate-forme, utilisées en commun, offrent des possibilités plus importantes en la matière. « Un programme spécifique a été développé pour les partenaires afin de favoriser le portage ou le développement d’application sur le cloud Oracle, » rappelle Thomas Kurian.

Microsoft et Salesforce : partenaires… en embuscade ?

Parce que l’interopérabilité devient cruciale dans le monde du cloud ou l’open source gagne du terrain, les éditeurs ont tout intérêt à favoriser la communication entre leurs solutions, comme l’exigent légitimement les entreprises.

C’est la raison pour laquelle, en juin dernier, Oracle signait un accord historique avec Microsoft certifiant ses technologies pour Hyper-V et Windows Azure. Le lendemain, le leader mondial des bases de données annonçait un partenariat encore plus avancé avec Salesforce. Des accords qui profitent aussi pleinement à Microsoft et à Salesforce, vu la pléiade d’applications Oracle ou sous Oracle à travers le monde.

Des rapprochements entre concurrents qui ne sont pas sans créer quelques situations embarrassantes. Sur OpenWorld, il était intéressant de constater à quel point les décideurs Oracle étaient gênés aux entournures (voire un peu outrés) en assistant à la présentation de Microsoft (véritable page de publicité pour ses solutions durant une session de plus d’une heure), et à la présence de ce “partenaire“, concurrent très véhément aussi bien sur la base de données que sur les autres produits Oracle. Pragmatisme économique oblige !

Une ouverture qui passe aussi par Openstack

« La stratégie cloud d’Oracle assure la compatibilité avec Openstack aussi bien pour les serveurs, le réseau ou le stockage, la programmation ou les applications. Openstack favorise l’accès aussi bien aux éléments Iaas que Paas de nos solutions cloud, » affirme Thomas Kurian.

Ensemble de logiciels libres destinés à la conception de clouds publics ou privés, la communauté Openstack simplifie le déploiement de serveurs et stockage virtuels. Ses trois projets principaux : Openstack Compute ou Nova (gestion de réseaux de machines virtuelles – instances serveur et contrôle d’accès – avec architecture redondante et évolutive, via une interface d’administration et une API nécessaire à l’orchestration du Cloud. indépendant du matériel et de l’hyperviseur) ; Openstack Object Storage ou Swift (stockage de tout objet via interface REST, au minimum triple réplication pour la haute disponibilité, indépendant du matériel) ; et Openstack Image Service ou Glance (catalogue d’images d’OS serveur utilisables pour démarrer les instances virtuelles ; stockage, découverte, enregistrement et distributions d’images disques de machines virtuelles).

Oracle a donc annoncé la compatibilité d’Elastic Compute avec Openstack Nova et du stockage de ses services Cloud avec Openstack Swift.

L’intégration annoncée de Nimbula Director (gestion et automatisation des ressources et des charges de travail en infrastructure cloud privé et hybride) à Exalogic Elastic Cloud confirme l’adoption de ces technologies Openstack par Oracle.

La compatibilité du cloud d’Oracle avec Openstack facilite la communication des cloud maison avec ceux reposant sur les solutions d’autres éditeurs. En principe…  Encore faut-il s’assurer que tout le monde implémente ces technologies correctement et assure le maintien des évolutions.