Neutralité du Net : le CNN propose de légiférer

Le Conseil national du numérique (CNN) a rendu public mardi son avis recommandant d’inscrire la neutralité d’Internet dans la loi. Bercy se prépare pour 2014.

Comme Bercy l’avait annoncé en janvier, la ministre Fleur Pellerin a officiellement accusé réception mardi 12 mars de l’avis du Conseil national du numérique (CNN) relatif à la neutralité du Net.

Adoptée à l’unanimité le 1er mars par le CNN désormais présidé par Benoît Thieulin (La Netscouade), cette réflexion est basée sur un rapport du groupe de travail dirigé par Christine Balagué (Renaissance Numérique) et composé de : Serge Abiteboul (INRIA), Tristan Nitot (Mozilla), Marc Tessier (Forum des Images), Jean-Baptiste Rudelle (Criteo), Jean-Baptiste Soufron (secrétaire général du CNN) et Bernard Stiegler (IRI).

Malgré les atermoiements de l’exécutif français, le CNN préconise d’inscrire dans la législation nationale la neutralité d’Internet, soit l’accès non filtré à l’ensemble des sources, contenus et services disponibles en ligne.

Intégrer la neutralité du Net à la loi de 1986

Considérant que « la liberté d’expression n’est pas suffisamment protégée dans la loi française face au développement des pratiques de filtrage, de blocage, de censure, de ralentissement », le Conseil est d’avis que la neutralité doit être reconnue comme « un principe fondamental » à « inscrire dans la loi au plus haut niveau de la hiérarchie des normes ».

  • Légiférer en faveur du principe de neutralité

Le CNN ne propose pas de plancher sur un nouveau texte, mais d’intégrer la neutralité du Net à la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication. Pour ce faire, celle-ci deviendrait la loi relative « à la liberté d’expression et de communication », une fois associés au deuxième alinéa de l’article premier les termes suivants :

« La neutralité des réseaux de communication, des infrastructures et des services d’accès et de communication ouverts au public par voie électronique garantit l’accès à l’information et aux moyens d’expression à des conditions non-discriminatoires, équitables et transparentes. »

  • Le rôle du juge

Parallèlement, le CNN estime que le principe de neutralité du Net doit « compléter et éclairer les dispositions juridiques existantes ». Ainsi, « en tant que liberté fondamentale, son application doit être contrôlée directement par le juge ».

Cette application doit être « adaptée à l’innovation technologique, à la transition économique et à l’évolution des usages, notamment en direction des mobiles, du pair à pair et des objets connectés ». Dans ce contexte, il revient au « pouvoir exécutif ou législatif de fixer une méthode de gouvernance et des objectifs de délai s’ils le jugent nécessaire ».

  • La mise en place d’indicateurs

Le Conseil appelle, enfin, à la mise en place d’indicateurs « pour mesurer le niveau de neutralité des réseaux et des services ouverts au public ». Ce projet ferait l’objet d’une collaboration entre acteurs économiques, politiques et régulateurs, en France comme à l’échelle européenne.

À qui profite la neutralité ?

L’avis du Conseil national du numérique laisse sur sa faim La Quadrature du Net. L’organisation de défense des droits et libertés des citoyens sur Internet regrette dans un communiqué « la dissolution du concept de neutralité du Net et l’absence de mesures contraignantes » à l’égard des opérateurs télécoms.

« Comme l’ont déjà fait les Pays-Bas, la Slovénie, le Chili et le Pérou, la France doit légiférer pour garantir la neutralité du Net en prévoyant des sanctions dissuasives contre les opérateurs qui restreignent de manière illégitime nos communications en ligne », a déclaré Jérémie Zimmermann, cofondateur de l’association.

De son côté, Fleur Pellerin a réaffirmé lors d’un point presse que la neutralité d’Internet, qui devrait être inscrite dans la loi française en 2014, doit être abordée sous deux angles : la liberté d’expression et les équilibres économiques entre acteurs.


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