IoT : Bouygues Telecom place LoRa face à Sigfox

Bouygues Telecom a très tôt fait le pari de la technologie LoRa pour sa stratégie dans l’Internet des objets. Aujourd’hui, l’opérateur réaffirme ses ambitions avec ce futur réseau des objets connectés ciblant, avant tout, l’industrie.

Opération concrétisation pour Bouygues Telecom dans l’Internet des objets. Olivier Roussat, PDG de l’opérateur, a convié Geoff Mulligan, chairman de l’alliance LoRa, pour faire un point sur la stratégie IoT et dévoiler les premiers clients dans ce domaine. En préambule, le président de l’alliance rappelle que LoRa comprend aujourd’hui 129 membres dont beaucoup d’opérateurs et des grands noms de l’IT comme Cisco et IBM. L’objectif de cette association est de promouvoir la technologie LoRaWan, via une certification des équipements réseaux nécessaires

Un réseau à quelques dizaines de millions d’euros

Cette technologie apporte des liaisons bidirectionnelles entre un objet et le réseau de collecte sur plusieurs kilomètres de distance, avec une faible consommation. Multifréquences, le protocole peut s’appuyer sur des fréquences basses (et libres de licences), afin de s’affranchir des obstacles pour pénétrer dans les bâtiments, et même les sous-sols, et couvrir les objets fixes comme en mouvement. A ceci s’ajoute « une géolocalisation à bas coût grâce à la triangulation », explique Patrick Sevian, PDG de Sagemcom, membre de l’alliance et fournisseur de cœur de réseau pour Bouygues Telecom. Une pique lancée à la concurrence et en particulier au Toulousain Sigfox, qui embarque un équipement GPS « plus cher et plus difficile à stabiliser ».

En termes d’équation économique toujours, le déploiement se fait « par adjonction du réseau existant », constate Olivier Roussat. Et d’évaluer cette extension « à quelques dizaines de millions d’euros » pour sa société. Une paille en comparaison des 10 milliards nécessaires à la construction d’un réseau mobile GSM. L’opérateur a déjà évoqué son plan de déploiement avec une première vague de 500 communes couvertes d’ici à la fin de l’année et une montée en puissance en 2016. Si le « sharing » est une des vertus de LoRa, Bouygues Telecom n’entend pas pour l’instant mutualiser son réseau avec un autre opérateur. Rappelons qu’Orange a annoncé très récemment qu’il adoptait LoRa comme protocole pour son propre réseau orienté IoT.

Changer le business model des industriels

Reste à déterminer les usages. « LoRa peut changer les business model dans les processus industriels », indique Olivier Roussat. Une manière d’expliquer, selon le Pdg, l’absence de témoignage public de la part des clients. Même si, dans la famille Bouygues, Colas s’intéresse de près à LoRa. Au sein de la société de travaux publics, les tests sont réalisés autour de deux axes : les capteurs de chaussée et les traqueurs pour équipements de chantier. Pour le premier, il s’agit de placer un capteur sur une place de parking afin d’avertir quand celle-ci est disponible, « LoRa permet de placer le capteur sans répéteur ou concentrateur pour réinjecter la donnée dans le réseau », affirme le représentant de Colas. La faible consommation énergétique est également un atout pour éviter de remplacer trop fréquemment le capteur.

Sur la partie équipements de chantier, l’équation économique est simple : « pour 1 euro de revenu, nous dépensons 50 cents d’équipements, soit un total de 6,8 milliards d’euros. Nous avons donc besoin d’optimiser la traçabilité des engins et du matériel ». Colas gère un total de 60 000 équipements, dont 16 000 sont équipés de traqueurs traditionnels. « Il reste donc 44 000 unités à équiper pour de la diffusion d’informations simples. Nous sommes en train de réaliser un POC (proof-of-concept ou test de faisabilité, NDLR) à Angers sur LoRa ». Le responsable parle aussi d’un test réalisé avec Colas Rail pour mesurer le serrage des éclisses.

Bouygues Telecom mise beaucoup sur LoRa pour toucher le tissu industriel. Tout en pensant à d’autres terrains d’action comme les smart cities, le domaine énergétique avec les compteurs intelligents, mais aussi les fermes, souligne Patrick Sevian. Pour la partie B2B2C ou B2C, il faudra attendre, confirme Geoff Mulligan, qui espère notamment une complémentarité entre des réseaux IoT différents comme Thread (consortium poussé par Google et Nest) par exemple. « Il peut exister un réseau extérieur LoRa et un autre dédié à l’intérieur de la maison qui serait celui de Thread », imagine Geoff Mulligan. Reste à travailler sur la question de la standardisation pour assurer l’interopérabilité et sur le roaming. L’alliance LoRa est en plein dans cette démarche, qui devrait aboutir en décembre prochain à la version 1.1 de LoRaWan.

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